Cécilea terminé son master de
communication au CELSA (à Paris), après avoir passé8 moisà Winnipeg (l'une des villes du Canada où l'hiver est le plus froid!) pour parfaire son anglais, elle entre sur le
marché du travail au Cameroun francophone (où il ne fait pas froid du tout). Marine étudie l'administration économique et sociale dans sa ville natale en deuxième année de licence. Pierre
est en seconde. Cathy continue à travailler dans sa crèche un peu cahotique et moi je suis toujours sur une direction d'école bien sympathique à dix kilomètres de la maison.
Présentation
Magnégné, c'est le joli nom exotique que portait notre première maison tropicale. Nous en étions très fiers jusqu'à ce que nous apprenions qu'il signifie "moche, mal
fait" en shimaoré, la langue vernaculaire.
Ceci dit et cela étant, la parenthèse tropicale s'est refermée, certes à regret, et nous revoici dans notre maison provençale pour ce deuxième retour.
Mais en réalité, je ne sais plus trop si cette parenthèse vient de se refermer ou si une autre vient de s'ouvrir...
Comprenne qui pourra!
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Eclaircissement
Fruit de l'évolution de notre précédent journal en ligne, ce blog (quel vilain nom) perd la confidentialité à laquelle nous tenions, mais gagne en esthétique et fonctionnalité. Que chacun en fasse bon usage !
Les premiers articles étant réédités, les dates de publication peuvent être trompeuses.
1/ on l'aura compris, parmi ces îles si contrastées et si agrables à parcourir, il reste encore de la place pour des émotions différentes, avec l'envie d'arpenter aussi Lanzarote et Fuenteventura ;
2/ il est temps de revenir à des albums sur un support papier alors que nous nous sommes contentés du support numérique jusque là, mais l'impact chronophage pour les réaliser demeure un écueil certain - à la retraite peut-être ?;
3/ nos photos nous ont laissés quelquefois sur notre faim et nous nous sommes offert un appareil numérique réflex avec un zoom 18-135mm pour revenir au confort et à la qualité de notre regretté Canon argentique (testé avec délectation à Palafrugell d'ailleurs).
Après notre semaine détente à Tiwi, nous prenons une navette privée en direction d’Arusha, point de départ des ascencionnistes du Kilimandjaro et des safaris tanzaniens avec le désir affiché d’accrocher du regard le géant africain. Mais celui-ci reste imperturbablement caché sous sa couverture nuageuse qui pourtant ne le réchauffe guère. A la fin de notre safari, dans la navette qui nous ramène à Nairobi, nous rencontrerons un jeune couple qui nous rapporte son épopée sur les pentes du plus haut volcan d’Afrique.
La frontière à Taveta marque un étrange contraste topographique brutal entre l’aridité et la pauvreté kényane et la verdure tanzanienne. La piste se métamorphose en une belle route bitumée qui dessert des maisons agréablement fleuries et entourées de champs fertiles.
A Arusha, en plein été austral, nous dormons dans la fraîcheur au pied du Mont Méru qui s’élève imperceptiblement à 4566 mètres d’altitude. Nous faisons la connaissance de notre chauffeur guide, John, aussi à l’aise en swahili qu’en français ou en anglais. Son indispensable et sympathique compagnie a assuré pour une grande part la réussite de notre séjour. Sans jumelles, il devine la présence d’un sombre léopard allongé sur une branche ou d’un guépard tapi sur une lointaine termitière. Avec ses compétences naturalistes en 4x4 et humanistes à table, nous avons découvert en John un professionnel accompli, un Tanzanien fier de son pays, le secrétaire national du syndicat des guides et un homme cultivé et ouvert, invité à un congrès d’écologistes en marge du festival de Cannes !
Grâce aux conseils de Corto Safaris, notre programme équilibré nous a amenés au cœur du pays masaï, tout d’abord dans le parc du Tarangire riche notamment en baobabs et en troupeaux d’éléphants assez peu nombreux par la suite.
Le Ngorongoro, un concentré d’Afrique
Le fabuleux Ngorongoro abrite un écosystème particulier, sans girafes faute d’eucalyptus et d’acacias, Ce cratère auquel nous consacrons l’entière matinée renferme des espaces divers, savane, prairies, ruisseaux buissonnants, mares, marécages, qui permettent à la faune africaine de foisonner. Nous vivons alors un documentaire animalier en direct au milieu d’un paysage somptueux.
Je m’épanche sur le sort d’un vieil éléphant errant dans le cratère, écarté du troupeau par une matriarche dominante qui vit dans les forêts établies sur le cône extérieur du Ngorongoro. Personne n’a encore songé à créer la fondation Gologolo pour doter ces malheureux en substance médicamenteuse appropriée.
Au loin, un nuage de poussière signale l’incursion de Masaïs qui viennent abreuver leurs vaches aux côtés des derniers rhinocéros noirs de la région, les autres ayant été décimés par les braconniers pour leur corne « aphrodisiaque ».
Nous pique-niquons dans une aire aménagée. Sans prêter l’oreille aux recommandations de John, nous déballons nos victuailles à l’écart des voitures. En quelques instants, une bande de milans noirs tournoient au-dessus de nos têtes et fondent sur nos sandwiches en nous donnant des coups d’ailes au passage.
Avant de quitter le parc du Ngorongoro qui s’étend autour du cratère, John nous propose la visite d’un petit musée anthropologique établi sur des fouilles archéologiques dans les gorges de la rivière Odulvai. Les ossements des cousins de Lucy et de leurs animaux contemporains s’étagent dans les strates géologiques jusqu’aux couches les plus récentes en suivant l’évolution humaine. Nous venons en effet de franchir une des fractures de la Great Rift Valley qui zèbre l’Afrique de l’Égypte à l’Afrique du Sud.
L’infini Serengeti
Le Serengeti, littéralement plaine sans fin en langage masaï, compte deux millions de gnous, un million de zèbres, trois mille lions (simba, en swahili). Nous avons vu plus de trente félins royaux ! Sans compter ceux que nous avons entendus sans les voir. Nous avons passé trois nuits sous tente dans l’ambiance « Out of Africa ». John nous a souhaité comme à son habitude une nuit douce, légère et chatouillante. Au beau milieu du silence de la nuit africaine, en ce premier janvier, les hyènes ricanaient, répondant au râle sourd des… lions qui rôdaient autour de notre camp, quelquefois tout près de la tente. Sensations exceptionnelles garanties. Jusqu’au dernier safari avant de quitter la Plainesansfin, nous avons eu droit en deux heures à un festival de lions et de lionnes perchés sur le rocher du Roi Lion, un couple de léopards à terre, des zèbres et de gnous à perte de vue, des marabouts, une dizaine d’espèces d’aigles, des vautours…
Malheureusement, l’appareil photographique de Marine équipé d’un bon zoom et sur lequel nous comptions a dû être victime des mouches tsé-tsé aux abords de la rivière Serena. Ces petits taons agressifs, probablement plus dangereux que les lions, prolifèrent incroyablement en cet endroit mais sont heureusement absents des zones de campement, en tout cas de la nôtre. Des tissus en forme de drapeau bleu et gris imprégnés de répulsif, dispersés çà et là, protègent les touristes… et la jolie manne financière qui tombe dans l’escarcelle de l’État tanzanien.
Lors de notre première sortie safari en Afrique du Sud, le guide nous avait demandé quel animal nous avions envie de voir. Pierre avait répondu : « Un hippopotame», ce qui avait bien fait rire le chauffeur. Je partage aujourd’hui l’avis de Pierre. Les hippopotames de la rivière Serena nous ont offert en privé un mémorable concert de basses dominé par les tubas et les cors.
Les vautours nous ont également livré un spectacle de choix. Par intermittence, à proximité d’un point d’eau, quelques individus s’enfoncent dans les herbes hautes et en ressortent avec un maigre butin débordant du bec. Au bout de longues minutes de ce petit manège, un jeune lion, puis deux autres, émergent de la couverture herbeuse. En fait, les restes d’un festin royal attisent la convoitise des charognards perchés par dizaines sur un acacia jaune. A quelques mètres en retrait, une famille de hyènes à son tour apparaît. Les zèbres, les gnous et les gazelles dessinent un large cercle préventif autour de la table dressée afin d’éviter de jouer le rôle du plat principal. Tous les indices de ce tableau nous avaient échappés au prime abord. J’ai constaté par la suite qu’une telle disposition circulaire des mammifères herbivores trahissait souvent la présence masquée d’un félin.
Au terme de ce safari jubilatoire dans des paysages somptueux, un avion doit nous ramener à Arusha. Nous arrivons sur un petit aéroport de brousse. Nos bagages sont engouffrés rapidement dans le ventre du petit appareil à hélices. Nous prenons place sans montrer le moindre justificatif. La simple présence du 4x4 rangé au bord de la piste supplante la production des billets d'avion, la vérification des identités et le contrôle des bagages.
Infini Serengeti, mais fin du safari
Après le survol du cratère Ngorongoro et de son homologue encore actif, nous quittons cet univers privilégié que la nature nous a offert et retombons dans la foule anonyme. Nous rejoignons Nairobi en navette. Vers la frontière, le Kilimandjaro s’estompe toujours derrière les nuages. Une courte nuit d’hôtel et nous nous retrouvons à l’aéroport de Nairobi avec nos réservations confirmées mais sans places dans l’avion de Kenya Airways. Assez furieux dans un premier temps, nous sommes consignés pour trois jours entiers dans la capitale kenyane à la si mauvaise réputation. A la réflexion, je me dis que je pourrai ainsi trier mes photos et entamer le présent récit plus tranquillement qu’à la maison.
Nous sommes logés en pension complète au centre ville, dans un bel hôtel pourvu d’une piscine, avec un appréciable défraiement légal consenti par la compagnie aérienne. La presque totalité des clients de l'hôtel sont, comme nous, des clients éconduits par Kenya Airways.
Le cœur de Nairobi s’avère calme la journée, propre, avec des artères modernes qui encadrent des quartiers plus africains où nous avons pu réaliser nos derniers petits achats affectifs : un T-shirt « Hakuna matata » pour Pierre, un sac en toile pour Marine et un kikoï, pour moi - tissu au motif typique - transformé en future nappe afin d’accueillir dans six mois nos prochains invités et fêter notre retour définitif dans le Vaucluse. Voilà, l’invitation est lancée. Karibuni Jonquerettes ! (bienvenue à Jonquerettes)
Le retour sur Mayotte nous amène à survoler le plus haut sommet d’Afrique en gros plan. Cathy saute de joie, le Boeing en tremble encore. Malgré ses 5892 mètres et une température polaire, le Kilimandjaro se couvre de neiges presque plus éternelles… N’est-ce pas John ?
Tout commence par un bon voyage, selon l’adage. Notre Boeing 770 avait à peine une heure de retard au départ de Dzaoudzi et l’agence de Kenya Airways à Mayotte nous avait assuré que deux heures de transit suffiraient à Nairobi. Sauf que Mombasa n’est pas un aéroport international malgré son million d’habitants et qu’il faut quitter l’aéroport international de Nairobi pour prendre un vol intérieur avec son cortège de formalités : change à l’arrivée, douane, contrôle sanitaire, visas, récupération des bagages et réenregistrement.
Nous avons donc raté la correspondance de notre vol Nairobi – Mombasa mais, ouf ! nous avons pu trouver des places sur l’avant dernier vol. Mais par on ne sait par quel mystère, l’hôtesse a décidé à notre insu que nos bagages seraient eux convoyés sur le dernier de vol de la journée. Nous nous sommes donc retrouvés à Mombasa sans bagages et sans information sur leur acheminement. Nous n’étions d’ailleurs pas les seuls à goûter ce soir-là cette mésaventure assez fréquente paraît-il avec Kenya Airways, « la fierté de l’Afrique » . Ceci dit, notre Cécile a connu le même problème à Bogota deux jours plus tôt.
Au titre des petites contrariétés, il nous a fallu avancer 45 US $ pour le transfert qui normalement était inclus dans notre paiement initial. L’arrivée de nuit au Tiwi Beach Resort ne nous remonte pas le moral ; on nous introduit dans deux chambres dont le ménage n’a visiblement pas été fait et où les lits sont en vrac et les serviettes d’occasion. Il a fallu que Cathy s’en étonne pour que le préposé convienne que les chambres n’étaient pas prêtes et qu’on nous dirige vers deux chambres plus accueillantes. Hormis les moustiquaires exiguës et usagées, notre résidence hebdomadaire nous satisfait pleinement par son aspect spacieux, fonctionnel et coquet.
Bien sûr, sans maillot, sans habits de rechange, notre tenue de voyage odoriférante n’est pas la plus appropriée pour aller en jean sur la plage ou se baigner en culotte dans la piscine. On se rend alors compte que certains objets futiles et insignifiants nous sont en réalité carrément indispensables. Ce qui m’a le plus manqué, c’est ma brosse à dents. Et vouloir en acheter une le dimanche dans un hôtel isolé au bout d’une piste de quatre kilomètres tient de la gageure. A ce moment-là, on se dit qu’on est bien mieux chez soi.
Cependant ces aléas matériels mineurs sont rangés aux oubliettes dès l’instant où un émissaire de la compagnie Kenya Airways nous livre nos bagages en fin de matinée.
Jambo !
Ce convivial bonjour ou salut, entendu ensuite des centaines de fois, trouve enfin un écho favorable en nous. Nous pouvons alors apprécier l’hôtel qui en dépit de la très haute saison et de ses 210 chambres ne donne jamais l’impression d’être bondé. Il est même étrangement calme dans la journée, sauf depuis l’arrivée d’un groupe de « Fram-çais » le 25 avec Corsair Fly qui a rouvert sa ligne Paris - Mombasa à Noël.
L’alizé ventile la plage – gardée - sans interruption et berce les palmes des cocotiers qui distillent un ombrage généreux pour les clients au rythme « polé polé « . On dit mora mora en malgache, la combinaison des deux ayant donné en français le terme mollo mollo dont l’étymologie m'est strictement personnelle.
A l’abri d’un lagon étroit, l’océan en cet endroit subit de faibles amplitudes de marée et la hauteur d’eau ne permet guère de s’ébattre sur le platier d’une trentaine de mètres de large, pauvre en poissons mais riche en algues incommodantes, sauf à l’intérieur de quelques baignoires où l’eau avoisine les 30°. Nous qui sommes habitués au lagon mahorais, probablement l’un des plus riches en poissons tropicaux, nous négligeons ces fonds sans corail qui pourtant plaisent aux quelques nageurs novices autour de nous. Il faudrait en fait se rendre à la journée au parc marin de Wasini pour profiter d’un vrai spectacle sous-marin, mais nous délaissons cette option.
L’immense piscine constituée de deux bassins principaux reliés par une rivière en escaliers comble Pierre qui rechigne à la quitter, y compris pour les crêpes du goûter. Son prof d’anglais serait satisfait, Pierre a volé de ses propres ailes entre piscines et activités organisées où les nombreuses nationalités et diverses communautés conversent en anglais véhiculaire : Danois(e)s, Hollandais(e)s et Allemands, Français, Polonais, Russes, Tchèques, Kenyans dont de nombreux Indiens enturbannés, Ougandais, Italiens, Suisses, Sud Africains, Chinois …, par ordre décroissant.
Des corneilles et des macaques aux testicules bleu azur s’invitent à la table des convives inattentifs et chapardent des fruits, des crêpes ou du saucisson. J’observe que les mets ronds attirent la convoitise des corneilles et confirment la fable de La Fontaine qui me paraissait scientifiquement saugrenue. J’en suis désolé, le cliché avec la crêpe ou la rondelle de saucisson au bec d’une corneille m’a échappé. Morale de la morale : nous sommes tous tour à tour corneille chapardeuse ou corbeau honteux et confus.
Marine, elle, a trouvé un lieu propice à la lecture et à la nécessaire méditation préparatoire au Bac.
Comme j’ai emmené mon nouvel ordinateur MSI ultra portable - acquis pour satisfaire à mes obligations professionnelles - afin de modifier et sauvegarder les photos, je peux préparer le présent article sur le champ et le publier avant la reprise du travail sans quoi cela risquerait de prendre des mois (le récit de notre voyage à Madagascar en octobre 2007 reste toujours en stand by...).
Cathy a consenti à passer sept nuits de vacances estivales dans le même lit, elle qui d’habitude nous aiguillonne au petit matin : « Allez, rangez vos sacs, on se dépêche, on doit y aller ». Peu importe le « y » pourvu qu’elle ait l’adresse. Cette entorse aux traditions familiales sied finalement à chacun d’entre nous. Cette coupure d’une semaine de vrai repos devrait nous permettre d’aborder en forme notre dernier semestre austral avant notre retour définitif dans le Vaucluse en juillet 2009…
Mombasa
Lectrice assidue du Routard, du Petit futé et du Guide évasion, Cathy nous a néanmoins poussés à la visite de Mombasa. Bien lui en a pris. La vieille ville où l’Islam métisse et cimente les populations, le Fort Jesus construit par les Portugais et conquis par les Arabes valent le détour, ainsi que la formidable coopérative de sculpteurs qui, fait exceptionnel en Afrique, vend à prix fixe.
Pour qui tomberait sur cette page de manière intéressée, le Tiwi Beach Resort se révèle être une destination recommandable, le personnel se montre charmant en toute circonstance et on apprécie de pas croiser de bestioles désagréables (cafards, moustiques, rongeurs…).
En longeant la côte sauvage qui hérisse ses flancs jusqu’au cap de Bonne Espérance, on surplombe l’Océan atlantique où, parallèles au rivage, les vagues se succèdent à l’assaut de la roche sombre. A chaque tournant, je scrute le meilleur point de vue photographique pour immortaliser le voile blanc de la longue plage où la lande buissonnante se marie à l’océan exubérant. Au cours d’un arrêt furtif, un mirage retient le regard de Marine. Elle m’en fait part. En contrebas, un geyser vaporeux s’est échappé d’un sillon bleu marbré d’écume. Je plisse les yeux, au loin, une baleine semble jouer dans la houle. Nous nous interrogeons sur cette vision anachronique : les baleines à bosse ont quitté Mayotte en octobre pour migrer vers les eaux antarctiques et doivent s’y gaver de krill depuis longtemps. Tout excité, je retourne à la voiture pour prendre les jumelles. Cathy, consignée pour garder la voiture chargée de tous nos bagages bien visibles, opte incrédule pour des dauphins.
Bercée par la respiration de l’océan, la baleine apparaît par intermittence. Sa queue caractéristique et sa longue nageoire pectorale se dessinent distinctement dans l’oculaire des jumelles. Une deuxième jubarte s’ébat un peu plus au sud. D’autres badauds nous confirment la présence de quelques baleines qui passent cette année leurs vacances de Noël en Afrique du Sud. Le phénomène serait rare mais pas exceptionnel.
Nous relayons Cathy et Cécile à la voiture pour ce spectacle absent de tous les guides touristiques. Nous avons pu observer les Big Five à terre et l’un des plus gros animaux en mer.
Le soleil décline, nous prolongeons notre périple vers Boulders Bay. Les autobus de touristes se sont gentiment évaporés. Des dizaines de pingouins du Cap nous accueillent dans leur tenue d’apparat et se laissent délicieusement approcher. Entre deux ballets de natation synchronisée, nous traînons parmi cette curieuse colonie qui a le sens de l’hospitalité. Nous multiplions les clichés, chaque pingouin semble poser.
Simonstown toute proche nous attend pour deux nuits. Plus modestes que celles des luxueux lodges où nous avons séjourné, nos chambres avec vue sur le port nous comblent. Nous sommes à l’aise sur ce quai paisible. Une sensation de bonheur nous enveloppe dans un écrin de sérénité.
Le lendemain, la route du cap nous amène à proximité de superbes plages fort peu fréquentées. Les cheveux au vent, une veste sur la poitrine, nous foulons un sable douillet qui ne nous invite aucunement à nous tremper dans l’océan frisquet d’autant plus que ces rivages sont fréquentés par d’autres belles bêtes au corps soyeux mais aux dents aiguisées : les requins.
Nous voilà enfin à l’extrêmité méridionale de l’Afrique, face au Pôle Sud. Pas tout à fait cependant. Le mythique cap de Bonne Espérance, découvert par Bartholomeu Diaz,a ouvert la route des Indes à Vasco de Gama. Mais à l’est, un autre cap encore plus méridional nous nargue : le cap des Aiguilles. Qu’à cela ne tienne, nous ferons demain un crochet vers cette pointe ou les eaux fraîches de l’Atlantique se glissent en cascade sous les eaux chaudes del’Océan indien.
Dans ce parc national, nous rencontrons des autruches désœuvrées. Un peu plus loin des babouins se prélassent sur la galerie d’une voiture. Son chauffeur tente une approche hasardeuse vers ces primates qui savent se montrer agressifs et qui ne semblent pas décidés à quitter laplanche à voile sur laquelle ils ont élu domicile !
Décidément, cette région du Cap tient toutes ses promesses, et plus encore. Le temps semblent avoir y posé ses valises .
Après une deuxième douce nuit à Simonstown, nous récupérons les nôtres avec un pincement au cœur. Nous entamonsla remontée vers l’Océan indien. Nous avalons les kilomètres jusqu’au Cap des Aiguilles.J’y prélève en souvenir un gros galet blanc qui n’aura de valeur que pour moi.
Nous reprenons la route jusqu’à Oudtshoorn, perdue sur les plateaux isolés. Pierre qui commence à avoir faim se lasse de cette monotonie. A une petite heure de notre but, la route, pour cause de travaux, s’éteint. La route, l’unique route. Est-il possible que nous ayons suivi depuis deux heures un itinéraire fléché mais pourtant barré ? Nous interrogeons un adolescent blond qui travaille dans une de ces fermes reculées. Il ne comprend pas l’anglais. Nous sommes ici au beau milieu du pays afrikaner.
Nous sommes contraints de rebrousser chemin et de reprendre l’itinéraire côtier au prix d’un détour de plus de deux heures. Pierre laisse vainement échapper sa colère. Encore heureux que nous ayons suffisamment d’essence… Il lui faudra patienter jusqu’à près 22 heures pour recevoir enfin son assiette au pays de l’autruche. Après notre coup de foudre pour la région du Cap, nous regrettons un peu cette étape au pays des kilomètres inutiles.
Le voyage touche à sa fin. Avant de reprendre au lever du jour un avion de South Africa Airlines à Port Elisabeth, nous atteignons notre dernière et ravissante escale à Saint Francis Bay, petite ville résidentielle construite autour de canaux. Notre hôte nous réserve une table dans un restaurant italien situé à … Mayotte circle, une rue circulaire dans le prolongement de Grande Comore street. Histoire d’amuser le restaurateur, j’enfile un sweat-shirt de Mayotte. Bien sûr, il ne savait pas ce qu’est Mayotte.
C’est donc sur Mayotte circle que nous refermons notre boucle en Afrique du Sud. Il nous reste juste à ne pas tomber en panne sur la route de Port Elisabeth. A Johannesburg, après de longues embrassades, Cécile se dirigera sur Paris tandis que nous prendrons le vol Johannesburg – Réunion puis le lendemain le vol St Denis – Dzaoudzi. A l’issue de ce magnifique voyage, je me demande si nous aurons encore l’occasion de nous retrouver tous les cinq hors de nos frontières…
La région du Cap a séduit les premiers colons européens avec des paysages du "vieux continent" assortis d'un climat considéré comme méditerranéen par les géographes. Effectivement, la culture de la vigne importée par des protestants français traduit bien la douceur de la région. Cette ville moderne accroupie entre la Table Mountain et l'Océan Atlantique possède un charme indéniable dès qu'on oublie ses faubourgs déshérités. Aujourd'hui, des Sud Africains s'en prennent directement aux immigrés d'Afrique Australe qui les concurrencent sur un marché du travail fermé malgré une croissance économique et un niveau de vie moyen qui surprend. Le parc automobile d'Afrique du Sud renferme la moitié du parc automobile de toute l'Afrique ! Pour boucler l'année 2007, notre programme de voyage nous dirige vers l'Aderlay Hôtel, à deux pas du Parlement. Nous nous retrouvons dans deux suites quidominent la principale artère. Les enfants bénéficient de deux salles de bain et deux WC.Une piscinechauffée coiffe notre hôtel. Malgré le pic estival, une sorte de Mistral frais et soutenu nous préserve de toute envie de baignade : le courant froid qui remonte de l'Antarctique sied plus aux pingouins qu'à des Provençaux acclimatés frileusement sous les Tropiques.... Habituellement, le centre ville se dépeuple en fin d'après-midi. Nous l'avons constaté au soir du Jour de l'An. Dans cette angoissante cité moderne désertée qui renvoie à Matrix, on se prendrait à incarner le rôle de Néo en version "live", sous le regard de quelques individus louches. Mais au soir du 31 décembre, la population s'entasse sous nos fenêtres pour le concours traditionnel des fanfares bigarrées qui défilent jusqu'au petit matin. Le lendemain, d'autres fanfares déambulent à nouveau sur Aderley Avenue en commémoration de l'apartheid. Les Noirs marquent symboliquement leur droit retrouvé de battre librement le pavé du centre ville de Capetown. Auparavant, leurs festivités étaient repoussées en dehors de la période des fêtes de fin d'année. En fait, l'autre centre villebatautour du port dont les hangars désaffectés ont été récemment reconvertis en boutiques occidentalisées et restaurants en tous genres. Le site placé sous la surveillance de dizaines de vigiles et de policiers reste le seul endroit tranquille à la tombée de la nuit. Attablés à la terrasse d'un restaurant italien, nous avons aperçu deux phoques qui se glissaient dans la pénombre des eaux du port. On rentre ensuite directement à l'hôtel en prenant soin de rouler portières fermées.
Le lendemain, la lumière du jour et la présence policière préventive sur les lieux tourisques nous entourent d'une sérénité retrouvée. Nous découvrons alors un mélange de Riviera et de Côte d'Azur à l'ambiance californienne sauce Seychelles avec ses gros rochers noirs et sa langue de sable blanc. La toponymie volontiers française dans une ville noire où l'afrikaans domine l'anglais renforce ce sentiment de mixage culturel décidément unique. Capetown la séductrice nous a conquis. Avec un brin de nostalgie, nous piquons plein Sud en direction de la péninsule du Cap de Bonne Espérance. Là encore, de nouvelles bonnes surprises nous attendent...
Au titre de "l'expérience culturelle" selon la terminologie des voyagistes, nous avons rendez-vous au Simunye Zulu Lodge à 15 h 30, au portail où il nous faudra laisser la voiture. Comme nous avons opté pour un tour d'adieu matinal au parc Imfolosy, le rendez-vous sera forcément raté et nous traînons autour de la ville de Cape St Lucia à l'allure californienne. L'appareil photo de Cécile a fait des caprices, presque toutes ses photos sont perdues. Nous effectuons donc une sage sauvegarde de nos différentes cartes mémoires. Au titre de "l'expérience culturelle" selon la terminologie des voyagistes, nous avons rendez-vous au Simuye Zulu Lodge à 15 h 30 au portail où il nous faudra laisser la voiture. Comme nous avons opté pour un tour d'adieu matinal au parc Imfolosy, le rendez-vous sera forcément raté et nous traînons autour de la ville de Cape St Lucia à l'allure californienne. L'appareil photo de Cécile a fait des caprices, presque toutes ses photos sont perdues. Nous effectuons donc une sage sauvegarde de nos différentes cartes mémoires. La montée vers le Zulu Lodge traîne en longueur. La route goudronnée s'efface au profit d'une piste poussiéreuse qui traverse sur des kilomètres des terres inhabitées. Nous parvenons enfin à la pancarte qui signale le fameux portail. Pas d'hôtel en vue. Juste une grange et un parking avec quelques véhicules de location. Mais où sommes-nous donc ?
La remontée vers le Zulu Lodge traîne en longueur. La route goudronnée s'efface au profit d'une piste poussiéreuse qui traverse sur des kilomètres des terres inhabitées. Nous parvenons enfin à la pancarte qui signale le fameux portail. Pas d'hôtel en vue. Juste une grange et un parking. avec quelques véhicules de location. Mais où sommes-nous donc ?
Sorti de nulle part, un autochtone nonchalant nous accueille. Alors que le soleil décline, il nous informe que nous avons raté la charrette tractée par des boeufs, celle qui emmène son lot de touristes à 15 h 30. Le lodge se cache quelque part, là-bas, derrière la colline et nous ne pourrons pas nous y rendre avec notre véhicule car le sentier caillouteux est complètement défoncé.
Le spectacle annoncé de danse et de chants zoulous va bientôt débuter à l'hôtel. Comment rejoindre à une heure de marche notre spectacle, notre table et notre lit avec tous ces bagages? Nous commençons à regretter notre détour quand l'employé nous informe d'un air détaché qu'il va nous emmener avec un bon vieux 4x4. Fallait le dire plus tôt ! Nous arrivons chez les Zoulous au son des tam-tams. Sur le site préservé d'un camp de chercheurs d'or, l'hôtel est constitué de cases rondes distribuées à l'image d'un village traditionnel. La nuit tombe, le spectacle vient de commencer. La danse répétitive jouée par des employés de l'hôtel et leurs enfants reconvertis pour la circonstance en objet "d'expérience culturelle" ne nous transcende pas. Cependant les chants harmonieux et envoûtants relèvent le spectacle. Les commentaires du gérant, lui aussi zoulou, nous apprennent en anglais que certaines de ces danses ont été créées par le célèbre King Shaka, ancêtre de l’actuel roi zoulou et plus habile guerrier que chorégraphe. Une des danses glorifie une victoire zouloue sur les conquérants écossais du XVIIIe siècle. Nos danseurs zoulous revêtent alors le kilt pour commémorer ce haut fait... Il a fallu attendre quelques décennies aux colons emmenés par Pretorius pour asseoir leur domination sur le Zoulouland. On comprend pourquoi aujourd'hui Pretoria a été débaptisée. Ceci dit, les panneaux indicateurs conservent l'appellation originelle attribuée par les Européens.
Les chambres sont superbement décorées de peintures murales représentant des tableaux de l'histoire coloniale. Pierre s'allonge sur le tapis en peau de zèbre. L'ambiance est décontractée. Nous dînons sous une tente au bord d'une rivière romantique auprès d'un couple de Suisses en voyage de noces. Mais pour nous comme pour eux, il importe de quitter les Zoulous au petit matin sans attendre le char à boeufs de l'après-midi : il nous faut au moins deux heures de route pour rallier l'aéroport de Durban et voler vers la province du Cap, dernière portion de notre périple sud africain.
A la lecture de nos premiers récits, on pourrait s’imaginer qu’à l’instar de certains touristes fortunés nous avons atterri près du parc Kruger pour sauter directement dans une Land Rover et pointer immédiatement nos objectifs sur les fauves qui s’impatientaient de nous accueillir. Non. Au terme d’une arrivée tardive à St Denis de la Réunion et d’un départ précoce le lendemain, nous avons débuté nos vacances par la visite d’une tristounette chambre familiale à l’hôtel qui n’a de Select que le nom. Ce curieux crochet nous est imposé par Air Austral. Il en a été de même au retour d’ailleurs. Pour la petite histoire, le vol Mayotte – Jo’burg coûte presque aussi cher que le vol Paris – Jo’burg, voire plus, en comptant la double nuit d’hôtel et les courses en taxi. Le lendemain, nous avons atterri à Johannesburg pour fêter les retrouvailles avec Cécile en provenance de Roissy. Depuis quelques jours, le personnel d’Air France est en grève à Orly. Cathy redoute des perturbations étendues à Roissy tout en repensant à Fabrice et Marylin qui ont dû annuler leur voyage en Chine au mois de novembre, toujours avec Air France. Je crois vraiment qu’il faut s’abstenir de voyager sur Air France aux périodes de pointe.
Notre correspondante de l’agence sud africaine nous accueille. Elle ne parle pas un mot de français, nous dissuade de confirmer tout de suite notre vol retour et se trompe sur notre circuit. Son téléphone sonne toutes les minutes. Ni sympa, ni professionnelle, la miss a l’air plus préoccupée par ses coups de fil que par ses clients et prend rapidement la tangente… . Nous l’avons constaté, on ne peut vraiment confirmer le vol retour que depuis Johannesburg. Même à l’aéroport du Cap, cela a été impossible. Après de multiples et infructueuses tentatives, il nous a fallu appeler l’agence de Mayotte pour que celle-ci s’occupe de notre confirmation du retour. Autre légèreté, notre correspondante a déclaré au loueur de voitures que nous n’allions pas au Swaziland. Nous devrons rechercher une agence Budget pour modifier notre assurance sans quoi l’entrée au Swaziland nous aurait été interdite par nos amis douaniers.
Nous avons ignoré la plus grande ville d’Afrique du Sud avec ses 6 millions d’habitants ainsi que Soweto. Le misérabilisme touristique ne nous a guère tentés. Pour mémoire, notre première location mahoraise à la Résidence Le Magnégné se situe rue de Soweto nommée fort à propos et notre maison actuelle fait face à un bidonville d’Anjouanais en situation irrégulière. Pas d’eau courante, juste une rivière qui nous sépare, pas d’égouts, de l’électricité pour quelques « privilégiés » dans leur case en tôle. La différence fondamentale, c’est l’incroyable étendue des bidonvilles aux ruelles rectilignes qu’on survole avant l’atterrissage à Jo’burg.
Nous filons directement déposer nos bagages au Irene Country Lodge protégé par une triple rangée de fil de fer barbelé et électrifié. L’Afrique du Sud possède d’ailleurs le deuxième rang mondial pour son équipement en fil de fer barbelé, derrière Israël.
D’emblée, je me suis senti mal à l’aise dans ce vrai lodge où la surface de nos deux chambres surpasse celle de notre maison à Mamoudzou. Je repense au Laka Lodge à Mohéli, tout simple mais tout mignon, au service maladroit mais chaleureux, et qui nous mettait parfaitement à l’aise. Ici, le salon du lodge, le professionnalisme et la livrée du personnel nous transportent dans un univers d’un luxe et d’un raffinement certes très agréable mais néanmoins dérangeant.
Pendant les vacances de Noël, les Sud Africains (ceux qui en ont les moyens) se ruent en vacances pour l’été austral. Les places sont rares et chères en cette haute saison que les agences de voyages métropolitaines évitent. Aussi avons-nous renoncé à réserver notre hébergement depuis Mayotte. Une fois nos billets d’avion payés, il ne nous restait plus que deux mois avant le départ. Nous avons confié une ébauche de circuit à l’agence Mayotte Tourisme et Voyages qui, après plusieurs tentatives infructueuses, a dépêché un intermédiaire parisien lequel a mandaté un correspondant sur place, l’agence Wilderness. Devant l’étroitesse de l’offre hôtelière, nous avons suivi les propositions du correspondant sud africain sans nous douter du niveau et de la qualité de l’hébergement réservé.
La surprise digérée, nous faisons un saut à Pretoria, une très agréable capitale à échelle humaine. Nous cherchons un monument cubique d’une quarantaine de mètres d’arête qui commémore le Grand Trek des Voortrekkers, les colons hollandais fuyant l’occupation britannique de la province du Cap. J’ose à peine l’avouer, nous ne l’avons jamais trouvé…
Une longue étape de transition nous transporte vers le Nord à travers des paysages de vergers qui alternent avec un relief moutonnant à la couverture végétale naturelle qui rappelle celle de l’Espagne méridionale. La Toyota Verso pourtant récente gémit au freinage et dans les virages tout en libérant des jets d’eau sur les chaussures de ma copilote. La climatisation fuit et les chaussures de Cathy font la gueule : les semelles se sont décollées. Sans tarder, nous mettons le cap sur l’aéroport de Nelspruit où nous parvenons à échanger notre Verso contre une confortable Nissan Xtrail aux allures de 4 x 4 malgré ses deux roues motrices.
Nous arrivons à Hazyview a Umbhaba Lodge. En bons petits Français, nous apprécions plus le confort des chambres, la sempiternelle théière et son accompagnement de friandises et la qualité de l’accueil que la gastronomie sud africaine de ce réveillon de Noël !
Le Père Noël profite du décalage horaire pour arroser tous les méridiens de ses petits cadeaux. Les nôtres s’étalent autour de la cheminée fort utile pendant l’hiver austral.
Nous honorons notre breakfast, plus qu’un break et pas fast du tout d’ailleurs puisque Cathy et Cécile au sommet de leur gourmandise nous poussent à goûter tous les délices… Nous sommes à présents bien avisés. Nous ne nous trompons plus. La petite assiette devant nous ne sert pas à manger la salade de fruits nappée de fromage frais et de céréales pas plus que les pâtisseries ou l’œuf au bacon. Ce n’est pas une assiette à dessert mais une assiette pour la desserte !
En quittant le lodge, je cherche ma route ; mon copilote feuillette ses cartes et je stationne sur un terre-plein quand un véhicule de police m’apponte. Pendant que Cécile et Cathy me blâment, je balbutie quelques mots qui trahissent notre origine touristique. Les policiers attendris décident alors de nous escorter dans la ville. Ils arrêtent un deuxième véhicule de police chargé de nous escorter sur quelques kilomètres. Au détour d’un virage, nous filons à l’anglaise pour prendre quelques clichés et retrouver notre liberté.
Nous voilà partis pour la journée au milieu des forêts d’eucalyptus en direction des montagnes du Drakensberg - qui culminent à 3482 mètres - en passant notamment par les cascades de Graskop, de Berlin Falls et Lisbon Falls, lesquelles nous ramènent à la colonisation pionnière. Le Blyde River Canyon est bondé de touristes et certains sites ne sont même pas accessibles ! Nous préférons couper court et atteindre le village de pionniers de Pilgrim Rest en cette fin d’après-midi. Les bus ont déserté le site et rendu le village à ses habitants qui ont su magnifiquement conserver les maisons dans leur apparence originelle.
Après une deuxième nuit au Umbhaba Lodge, nous rallions le mythique Kruger Park qui, on le sait, a tenu plus que ses promesses.
Au poste frontière, je prends bien soin d’exhiber le bon passeport. De retour en Afrique du Sud, nous arrivons au Hilltop Camp au cœur du parc national Hluhluwe-Imfolosy. Si vous projetez de vous rendre en Afrique du Sud, entraînez-vous à prononcer les [Hlu] dans une double expiration partie du fond de la trachée artère. A défaut prononcez [chlu] comme le conseille le Routard. Sinon, poursuivez votre lecture, il est peu probable que vous ayez à caser le parc Hluhluwe dans une conversation mondaine.
Les gardes du parc nous enjoignent formellement de ne pas sortir de la voiture, de fermer les fenêtres et de rester sur les sentiers et routes balisés. Je repense aux conditions de liberté dans lesquelles nous avons circulé aux parcs Kapama et Mlilwane tout en obtempérant, sauf pour les vitres. Certains humains sont plus liberticides ou plus sages que d’autres. Certains fauves seraient-ils plus sauvages que sauvages ?
Nous nous débarrassons prestement de nos bagages pour la virée de fin d’après-midi. En serpentant avec notre véhicule de location le long des sentiers, un sympathique chasseur d’images nous signale deux lionnes qui se prélassent à 3 kilomètres de là. Jusqu’à la tombée du jour, nous sillonnons cette réserve habitée par quatre des Cinq Grands puisqu’il n’y a pas de léopards ici. Ceci nous permet de revoir la faune sauvage dans des paysages rappelant plus la savane : rhinos, éléphants, zèbres, girafes... et des babouins se chamaillant près des ponts qui enjambent de maigres ruisseaux.
Après une nuit de repos, nous décidons de retraverser le parc Hluhluwe (petite révision du [hlu]) dans sa diagonale se prolongeant par le parc Imfolozi avant de quitter le Nord de l’Afrique du Sud. Bonne initiative. Par une succession de coups de museau sur le ventre de sa mère, un jeune phacochère la contraint à se lever pour la tétée. Plus loin, deux puis trois puis quatre véhicules barrent le chemin. À une petite centaine de mètres de la route, dans le champ des jumelles, un couple de guépards monte la garde.
En résumé, à la mi-séjour, nous faisons nos comptes. La météo reste favorable. Nous avons photographié tout le panel de la faune africaine que nous n'osions espérer observer en totalité dans la partie septentrionale de l'Afrique du Sud. Nous avons laissé les oiseaux voleurs aux ornithologues ; les oiseaux nageurs nous attendent gentiment dans la région du Cap et les oiseaux coureurs à Oudtshoorn. À vos souhaits ! Et toujours pas de porc-épic en vue.
Le bilan de notre premier safari nous a comblés quoique, ironie, le seul guépard de la réserve de Kapama soit statufié à l’entrée du lodge. Au hasard de nos rencontres, nous avons croisé les Big Five et les Small Five dont une tortue terrestre, des caméléons, animaux communs sur nos îles de l’Océan indien, mais pas de porc-épic ni de mouche tsé-tsé comme on en trouve au Parc Serengeti, et pratiquement pas de moustiques.
Nous prenons donc la direction du Swaziland, état indépendant entre l’Afrique du Sud et le Mozambique, dont le roi fort occupé avec ses deux douzaines de femmes a dû s’offrir un jet personnel, peut-être pour aller plus rapidement de l’une à l’autre, ce que les lettrés désignent par transport amoureux... Les aigles sont partout présents. A la traversée de la superbe et dépeuplée chaîne frontalière qui rappelle les Préalpes, on imagine une contrée sauvage avec des zoulous qui se trémoussent en chantant au bord des pistes dans la tenue ancestrale.
En Afrique du Sud, les routes sont impeccablement entretenues. Pour pénétrer au Swaziland, Cathy la copilote a opté pour une sympathique route de montagne qui s’est rapidement transformée en angoissante piste déserte où nous n’avons vu en une heure que deux véhicules, un dans chaque sens. Enfin, au poste frontière de Josephdal, il faut descendre du véhicule et saluer le préposé. En réponse à sa curiosité administrative, je lui réponds que nous nous rendons au parc Mlilwane. J’écorche à tel point le nom que mon interlocuteur me repose la question. Il finit par deviner notre destination et entreprend imprudemment une délicate leçon de prononciation des occlusives africaines, ce qui semble l’exaspérer. Il prend ensuite tout son temps pour inspecter les papiers, le permis, l’assurance pendant que sa collègue tricote. On la comprend, à cette altitude, la température doit chuter pendant la saison froide. Et le policier se montre particulièrement pointilleux. Il refuse de comprendre comment je peux lui présente le passeport individuel de Pierre sans visa d’entrée en Afrique du Sud. Une difficile discussion s’engage en anglais. C’est toujours mieux qu’en bantou, soit. Mais dans mon anglais fragile et avec l’aide de Cécile dans le rôle de l’interprète, je lui explique alors qu’à l’aéroport j’ai seulement présenté mon passeport en règle sur lequel figure Pierre. Mais alors, pourquoi lui présenter maintenant le passeport de Pierre et pas uniquement le mien, hein ? Cathy perd son calme, s’en prend au préposé et finit par m’enguirlander. Après avoir repris en boucle trois fois la même question assortie d’une réponse identique, j’imagine que le brave homme s’est bien diverti et consent enfin à nous lever la barrière. En redescendant sur le plateau central du Swaziland, nous découvrons ébahis de belles routes, puis des viaducs tout neufs et enfin des voies rapides. Le ciel se couvre et nous arrivons enfin au parc Mlilwane à la nuit tombante en même temps que la pluie. Nous sommes accueillis par des gazelles qui rôdent autour des bungalows au confort rustique. Au petit matin, les nuages se sont évaporés et le site apparaît sous sa splendeur. Dans le parc, les zèbres, les gnous, les antilopes se promènent paisiblement en l’absence de grands prédateurs, à condition de se tenir à l’écart d’un lac dans lequel des hippopotames font trempette avec des crocodiles. A quelques mètres de la berge, un crocodile nous observe.
Nous sortons de la voiture en conservant les portières ouvertes au cas où l’impressionnant reptile mettrait fin à sa baignade sans crier gare. Nous aurions très volontiers passé deux nuits dans ce parc magnifique que de nombreux visiteurs parcourent à pied ou en VTT. Mais une longue route nous attend jusqu’à notre prochaine étape. A suivre…
Parés pour le safari photos, munis d’une caméra numérique, de trois appareils numériques (celui de Marine avec un zoom x 6, celui de Cécile et le nôtre), d’un reflex avec doubleur de focale pour des tirages papier de qualité et en gros plan, chacun de nous s’est essayé à immortaliser les scènes animales. Pierre n’était pas le dernier à mitrailler.
Tout cet attirail ne s’est pas révélé superflu, loin s’en faut. L’appareil de Cécile a rendu l’âme pendant le voyage en détruisant tous ses clichés. Comme ma carte mémoire donnée pour un 1 Go ne dispose en réalité que d’une mémoire de 500 Mo, j’ai dû me restreindre et surtout freiner Cathy dont l’index droit frétille verticalement dès qu’on lui met un boîtier entre les mains. Au final, pour reprendre un terme branché en métropole, nous avons conservé 805 images numériques sans compter les quatre pellicules qui ne seront pas développées dans l’immédiat (je me méfie du développement des pellicules à Mayotte).
Le zoom du reflex s’est quelquefois avéré trop puissant tant les animaux nous étaient proches, à mon plus grand étonnement. A vrai dire, je ressentais secrètement quelque inquiétude à l’idée d’importuner les « Big Five » dans leur pré carré, mais en bon père de famille – où en vrai poltron qui n’ose l’avouer? - je ne laissais rien transparaître. Sur le parking, la découverte des 4x4 décapotables ne participait pas à ma mise en confiance. Juste avant notre baptême du feu numérique, un des gardes a traversé le hall de l’hôtel, un fusil à la main sous une housse, ce qui me rassurait tout en m’inquiétant... Mais une fois dans notre véhicule, je n’ai repéré aucune arme à disposition de nos guides. Pourtant, dès nos premières rencontres avec la faune sauvage, la sérénité de nos deux accompagnateurs et la beauté du spectacle m’a lavé de toute appréhension. Je vous laisse imaginer notre surprise et notre plaisir quand nous nous sommes retrouvés à quelques mètres de ces montagnes de viande.
Au fait, quels sont les Big Five ? Non, pas la girafe, ni l’hippopotame. Les cinq grands sont ceux qui présentaient un intérêt pour la chasse : le lion, l’éléphant, le rhinocéros, le léopard et le buffle.
Pour nous éviter une déception proportionnelle au coût du voyage, nous avions opté pour un hébergement au cœur d’une réserve privée attenante au Parc Kruger, «The Kapama Game Reserve ». Le premier objectif était de loger sur place pour profiter au mieux des sorties matinales (de 6 à 10 heures) et en soirée (de 16 à 20 heures), les plus propices aux observations. L’objectif annexe était de profiter du spectacle animalier sans se retrouver en haute saison au beau milieu d’une foule de touristes. Comme beaucoup de mes congénères, je veux bien jouer au touriste, mais sans trop de touristes autour de moi.
Qu’avons-nous vu ? Les Big Five d’abord, ce qui n’avait rien d’acquis au départ: le groupe qui nous a précédés dans la Range Rover n’a pas vu la moindre moustache de félin en deux jours. Parmi nos rencontres : un lion isolé repéré par Pierre sous un arbre, un lion à la crinière noire qui s’en va chasser en famille,en compagnie de deux femelles et d'un jeune mâle, des éléphants plein cadre sur lesquels on voit parfois un écoulement hormonal se répandre derrière l’oreille, des rhinos sur la défensive, un léopard qui s’est enfui à notre approche, mais que nous avons retrouvé à la nuit tombée au prix d’une traque tout à fait étonnante. La demi-douzaine de 4x4 de la réserve est reliée par VHF, de sorte que dès qu’un véhicule aperçoit une curiosité, tous les autres véhicules en sont immédiatement informé. Les 4x4 qui patrouillent dans le secteur se regroupent. Ainsi, notre léopard se déplaçait dans la forêt sous le halo des phares et des projecteurs portatifs, en vraie vedette de spectacle. Mais la traque génère le trac et le léopard s’enfonçait de plus en plus dans les fourrés. Comme des bulldozers, les trois 4x4 présents sur le site ont alors tracé leur route hors piste en écrasant irrémédiablement les arbustes, voire de jeunes arbres, qui gênaient notre progression.
L’un des spectacles les plus saisissants a également concerné un lionceau qui a léché sa mère et qui s’est ensuite voluptueusement abandonné en retour.
Mais nous avons bien entendu pu contempler des girafes majestueuses, des zèbres impeccables, des gnous sur leur garde, d’adorables gazelles notamment des springboks, naturellement, des impalas, la grande antilope koudou… et des phacochères très craintifs qui sautillent allègrement sur leurs maigres pattes, la queue en l’air, comme dans le Roi Lion auquel on pense invariablement.